Maximus, l’homme qui décapita le roi des Daces

Avant l’Ecole des Annales l’Histoire s’intéressait peu aux vies des petits, des obscurs, des sans-grades auxquelles – tout comme la presse people de nos jours - elle préférait celles des grands de ce monde.

Rares sont donc les mentions de la vie des humbles dans les sources littéraires qui nous sont parvenues.

La vie de Tiberius Claudius Maximus fait exception à la règle.

Appartenant à une famille macédonienne fraichement romanisée – comme en témoigne son praenomen et son cognomen – ce dernier fit une brillante carrière militaire, carrière marqué par un coup d’éclat qui lui assura une indubitable notoriété ainsi qu’une promotion rapide et d’éclatants honneurs.

Qu’avait donc pu faire notre homme pour mériter tout ça vous demandez-vous sans doute ?

Eh bien, à la fin de la seconde guerre contre les Daces (105-106 ap. J.-C.), Maximus – après une longue poursuite – rattrapa Décébale, le roi des Daces, alors engagé dans une fuite éperdue. Se voyant sur le point d’être capturé par ses implacables adversaires, Décébale préféra se donner la mort. Maximus lui coupa alors la tête – alouette – ainsi que la main droite, macabres trophées qu’il rapporta à l’empereur Trajan.

L’exploit fut tel qu’il est à la fois – ce qui est exceptionnel - mentionné par l’historien Dion Cassius (LXVIII, 14, 3), lequel ne cite pas le nom du soldat qui rapporta la tête de Décébale à Trajan, et représenté sur la colonne trajane, cette colonne au fût recouvert d’une incroyable frise historiée le long de laquelle s’agitent plus de deux-mille-cinq-cents personnages qui composent un récit complet des deux guerres daces.

Ajoutons enfin que le nom de Tiberius Claudius Maximus n’est passé à la postérité que parce ce que ce dernier pris soin – de son vivant - de faire graver une longue inscription dans laquelle il relate ses exploits, prouvant – une fois de plus – que l’on n’est jamais si bien servi que par soi-même.

Pour les latinistes curieux, voici l’inscription en question :

Ti(berius) Claudius Maximus vet(eranus)

[s(e)] v(ivo) f(aciendum) c(uravit)

Militavit eque(s) in leg(ione) VII C(laudia) P(ia) F(ideli),

factus quaestor equitum,

singularis legati legionis eiusdem,

vexillarius equitum,

item bello Dacico ob virtutem donis donatus ab Imp(eratore) Domitiano,

factus duplicarius a divo Troiano in ala secunda Pannoniorum,

a quo et factus explorator in bello Dacico,

et ob virtutem bis donis donatus

bello Dacico et Parthico,

et ab eodem factus decurio in ala eadem,

quod cepisset Decebalu(m) et caput eius pertulisset ei Ranisstoro,

missus voluntarius honesta missione

a Terentio Scauriano, consulare exercitus provinciae novae Mesopotamiae.

Pour les curieux non-latinistes en voici la traduction :

Tiberius Claudius Maximus, vétéran,

fit élever ce monument de son vivant.

Il servit comme cavalier dans la légion VII Claudia Pia Fidelis,

fut nommé quaestor equitum,

puis garde personnelle du légat de la légion,

puis porte-enseigne des cavaliers.

Il participa à la guerre dacique, où il fut décoré pour sa bravoure par l’empereur Domitien,

puis promu duplicarius par le divin Trajan dans l’aile II des Pannoniens.

Ce dernier le nomma aussi explorator dans la guerre dacique,

et le décora à nouveau à deux reprises pour bravoure,

pendant les guerres de Dacie et de Parthie.

Il fut ensuite nommé décurion dans la même unité,

pour avoir capturé Décébale et lui avoir apporté sa tête à Ranisstorum.

Il se réengagea volontairement et fut congédié honorablement

par Terentius Scaurianus, gouverneur de la nouvelle province de Mésopotamie.

Pour en savoir plus : AE 1969/70, 583 et AE 1985, 721.

Ci-dessous : le monument funéraire de Maximus, que vous voyez-là, est aujourd’hui conservé au musée de Drama, en Grèce. Photo : musée de Drama.